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Son ordinateur travaillait sans relâche.
Jean-Louis Martin, pressé de trouver, finit par créer lui-même ses agents informatiques capables de traquer l’information sur le Net. Athéna l’assistait, déesse minérale bienveillante et omniprésente.
Il se mit donc à récupérer de petits programmes qu’il modifia lui-même pour satisfaire ses besoins. En hommage à Ulysse, il baptisa ces nouveaux agents informatiques : ses « marins ». Et tous ses « marins » étaient à la recherche non pas d’Ithaque, mais de l’Ultime Secret.
Les programmes qui activaient le cœur de ses « marins » étaient issus des dernières découvertes en intelligence artificielle, ils étaient donc capables de se reproduire et de s’améliorer pour atteindre un objectif donné. La première génération de « marins » se dispersa n’importe comment sur le réseau informatique à la recherche d’indices. Ensuite, sans aucune intervention humaine, ces centaines de « marins » firent le point, et désignèrent parmi eux les cinq à avoir obtenu les meilleurs résultats. Les autres disparurent et les gagnants furent autorisés à se reproduire. Ils fabriquèrent alors des centaines de programmes similaires à eux-mêmes mais encore plus spécialisés dans les domaines qui leur avaient valu leur élection.
Jean-Louis Martin avait eu l’idée de fabriquer ses « marins » en s’inspirant du darwinisme : sélection des meilleurs, encouragement des plus forts, aide aux plus doués et abandon de tous les incompétents.
Ce n’était certes pas un mécanisme moral mais, dans le domaine informatique, les programmes ne possédaient pas encore de conscience politique, songea-t-il.
La deuxième génération de marins se sélectionna elle-même de façon à permettre aux cinq meilleurs de donner naissance à des programmes beaucoup plus spécialisés dans leur recherche. Les marins de troisième génération profitaient ainsi de toute l’expérience et de toutes les connaissances des générations précédentes.
Il fallut quinze générations de marins pour parvenir à produire une bande de surdoués, qui finirent par toucher au but.
Celui-ci se trouvait en Russie, à Saint-Pétersbourg, au centre du cerveau dirigé par le docteur Tchernienko. Là, grâce à plusieurs indices infimes mais qui se recoupaient, les agents informatiques déduisirent que l’Ultime Secret avait été utilisé pour des expériences sur l’homme.